Sud-Ouest-1

  • Yvan Lavallée

Je viens ici livrer les termes d'un dialogue entamé avec des journalistes du journal Sud-Ouest qui mène à sa façon, la bataille idéologique sur une zône correspondant en gros à la nouvelle aquitaine.

Il s'agit là de la livraison du 27 mars 2020 en pleine épidémie du COVID-19

 

 

Le sam. 28 mars 2020 à 12:34, Ivan Lavallée <ivan.lavallee@gmail.com> a écrit :
Bonjour
J’ai lu attentivement vos articles de la livraison de S.O. du 27 mars, j’en ai bien apprécié le ton. Toutefois, permettez moi quelques remarques. Il serait sans doute bon de non seulement décrire ce qui est en ne minimisant pas les problèmes, mais en mettant en évidence l’incurie gouvernementale, non seulement par manque de prévisions (gouverner c’est prévoir ?) mais dans la gestion de la crise elle même, on en est à ne plus avoir de cotons tiges !
La question qui est posée aujourd’hui est : Qui doit mourir et qui doit vivre ?
A l’Hôpital Tenon, grand hôpital parisien, les malades de plus de 50 ans (oui 50 !) atteints de comorbidité (diabète, hypertension…) et infectés par le covid 19 ne sont d’ores et déjà plus pris en charge ! Les malades de plus de 60 ans ne seront non plus pris en charge dès cette semaine. Les personnels infectés sont priés de rester en poste par manque de moyens humains. 
Tous les services d’urgence sont amenés à faire des choix par manque de moyens matériels, techniques (lits -100.000 lits supprimés en 20 ans-, respirateurs…), humains.
La règle qui se dessine c’est que tous les patients de plus de 70 ans, votre père, votre mère ou grand mère ou vous peut-être qui développent des formes graves ne seront plus placés sous respirateurs et donc condamnés à mourir. La situation est tellement tragique que le gouvernement vient de convoquer le comité national d’éthique pour qu’il fixe les règles de la sélection sur des critères moraux !? Sordide !
Que l’on se comprenne bien. Il n’est pas question ici de blâmer les équipes médicales qui opèrent ces choix terribles opposés à leur déontologie, mais de bien comprendre les tenants et les aboutissants de ces décisions. Car ce qui se passe, c’est qu’on meurt en masse du covid-19 pas tant à cause de la virulence de ce virus, mais parce que nous n’avons pas les moyens matériels et humains de prendre tout le monde en charge correctement ! C’est le manque de moyens de l’hôpital qui conduit à ces arbitrages horribles. Et c’est pourquoi, en fin de course, les responsables de cette situation devront rendre des comptes. Il ne devra pas y avoir d’échappatoire.Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Cette situation tragique est la conséquence attendue de décisions politiques successives qui depuis le milieu des années 80, réforme après réforme, plan d’économies après plan d’économies, ont fracturé puis affaibli et fini par mettre à genoux les services publics, dont celui de l’hôpital. Au nom de l’équilibre des comptes publics, puis des Traités européens, puis de la dette envers les générations futures, puis de l’adaptation à la mondialisation et à ses effets, … toutes les décisions politiques des gouvernements libéraux, quelle que soit leur couleur, ont construit la réduction de la dépense publique et sociale utile à la société pour servir un type de dépense publique utile à la baisse des prélèvements publics et sociaux sur les entreprises, tout particulièrement les grands groupes. Cette politique s’est tout particulièrement illustrée dans la politique publique de soutien à la baisse du coût du travail.
Une stratégie générale de soutien au capital et à sa profitabilité, sans apports positifs avérés pour le reste de la société, qui aujourd’hui s’écrase sur le mur sanitaire.
Bon, je pourrais développer encore sur les causes et les choix, car la crise, là, elle est POLITIQUE. Je connais bien l’orientation politique de Sud Ouest, mais il eut été tout de même de la plus élémentaire honnêteté, même si ça n’est pas « politiquement correct » de dire que seuls les communistes se sont opposés depuis des décennies à cette politique, à la casse du service public, et de l’APHP plus particulièrement. Service public, sécurité sociale qui sont dus pour l’essentiel aux ministres communistes du gouvernement De Gaulle ! 
Cordialement votre

Réponse du journaliste de Sud-Ouest

Bonsoir M. Lavallée

 
Je viens de lire votre courriel avec attention. . Dans le journal de vendredi, mon propos était d'essayer de comprendre pourquoi nous en étions arrivés la.Je crois que nous partageons le même constat. J'ose espérer que la règle ne se dessinera pas pour reprendre votre expression même si elle a commencé à être appliquée en Alsace. Mais il est certain que si l'épidémie continue à flamber,c'est ce qui se passera. Je crois qu'effectivement il y a une question de moyens, il y aussi d'autres problèmes, notamment le fait  qu'au sein du système hospitalier, l'administratif a pris le pas sur le médical et que l'entité hôpital s'est enfermé dans son bunker rendant toute collaboration impossible avec la médecine de ville. La solution pour l'avenir consiste à tout remettre à plat. Ce qui nécessitera des budgets autres.Quant aux orientations politiques de Sud Ouest, elles ne sont pas certes à gauche-gauche. Mais en 38 ans de carrière, à de très rares exceptions près, j'aitoujours pu écrire dans la plus totale liberté. Bien à vous.

Ma réponse:

Je vous remercie d’avoir répondu à mon mel, je n’en attendais pas tant, c’est tout à votre honneur.
Toutefois, vous restez, n’en déplaise, sur l’écume des choses. Encore une fois le problème est POLITIQUE, pas technique ni administratif, même si dans l’immédiat c’est ce qui apparaît, et il a été posé en termes politiques dès la Libération, car les ministres communistes d’alors ont fait le choix de servir la Nation en tant que son corps vivant, c’est-à-dire le monde du travail, en lui donnant directement, sans passer par une étatisation, la gestion des caisses, c’est d’ailleurs ce qui va permettre d’amortir pour les retraités français les conséquences de la crise financière qui s’étend alors que les fonds de pension (alimentés par la spéculation financière et donc sur l’exploitation de la force de travail) s’écroulant, les pensions basées, comme le veut la contre réforme en cours, sur ces fonds vont baisser drastiquement, voire pour certaines disparaître purement et simplement. Il s’agit là clairement d’un choix de société !
Encore une fois, l’administration n’est que l’organisation d’un pouvoir qui est lui politique et qui fait le choix du capital contre l’intérêt du peuple travailleur. J’attire quand même votre attention, au risque de paraître insister lourdement, sur le fait que ce n’est pas le capital qui produit la valeur, mais le travail et qu’il serait quand même normal que ce soit ce même monde du travail qui soit à même de décider ce qu’on fait de la valeur qu’il produit, c’était ce qui guidait les ministres communistes et qui est systématiquement mis en cause dès lors que le rapport de forces est défavorable au monde du travail. 
Je vous interpelle, je comprends que ce soit malaisé pour vous, mais quand même n’est-ce pas le rôle d’un journalisme de qualité d’aller au fond des choses et d’en mettre en évidence les tenants et les aboutissants ainsi que les acteurs passés et présents ainsi que leurs motivations profondes ?
Au passage, je suis Pupille de la Nation car mon père (ainsi d’ailleurs que ma mère) fut résistant, déporté NN triangle rouge, ils ont versé le sang qui a construit notre système de santé et plus généralement la France des jours heureux, celle du CNR.
Cordialement votre
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