Hommage à Bertold Brecht
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Par Ulrich Schneider de la FIR (Fédération Internationale des Réistants)
L'un des plus importants écrivains de langue allemande, Bertolt Brecht, décédé il y a 65 ans, le 14 août 1956. a écrit des pièces célèbres traitant du fascisme allemand en exil et après son retour en Allemagne au début des années 1950. Il témoigne ainsi du rôle essentiel des artistes dans la bataille idéologique.
Né à Augsbourg le 10 février 1898, Brecht est devenu l'un des plus importants dramaturges politiques de langue allemande dès la République de Weimar. En 1918, à 19 ans, alors qu'il a entamé à Munich des études de lettres et de médecine, Bertolt Brecht est mobilisé comme infirmier dans un hôpital de sa ville natale. Fin janvier 1919, quelques jours à peine après l'écrasement de l'insurrection spartakiste à Berlin, il entreprend la rédaction d'une pièce intitulée Spartakus, qu'il achève en six semaines. Avec ses pièces sur la révolution de novembre ("Tambours dans la nuit") ou ses pièces critiques du capitalisme, "Opéra de quat' sous" et "Sainte Jeanne des abattoirs", Brecht est devenu non seulement populaire, mais aussi un opposant au nazisme. À plusieurs reprises, des représentations théâtrales et cinématographiques (par exemple "Kuhle Wampe oder Wem gehört die Welt ?" A qui est le monde ?) ont été perturbées par les émeutes des commandos SA au début des années 1930.
Avec la prise du pouvoir par les nazis le 30 janvier 1933, Bertolt Brecht s'enfuit via Prague et Paris, puis s'exile au Danemark. De là, il a vu ses poèmes et ses pièces de théâtre brûler sur le bûcher lors de l'autodafé fasciste du 10 mai 1933.
Alors que sa famille peut vivre à Svendborg (Danemark), il est actif dans le cercle des exilés germanophones à Paris, où il crée ses pièces antifascistes. Il s'agit surtout des scènes "Grand-peur et misère du troisième Reich", avec lesquelles il décrit la réalité du fascisme allemand, ou du drame "Les fusils de la mère Carrar", écrit pendant la guerre civile espagnole et qui prend clairement position pour la défense de la République contre le coup d'État de Franco.
D'autres pièces encore célèbres aujourd'hui, comme "La vie de Galilée", qui traite de la défense de la science et de la connaissance, la pièce anti-guerre "Mère Courage et ses enfants" ou la pièce des Lumières "La bonne âme du Setchouan", ont été écrites pendant ces années. Dans ces pièces, Brecht a mis en pratique sa conception d'un théâtre éducatif épique.
Comme la menace que représente pour lui la politique de guerre fasciste s'était considérablement accrue depuis 1939, il se rendit d'abord en Suède en 1939, puis en Finlande, avant de recevoir un visa d'entrée pour les États-Unis en mai 1941.
Il y retrouve le compositeur Kurt Weill, avec lequel il avait déjà travaillé dans la République de Weimar. Cela lui donne l'occasion de travailler sur la scène artistique à tendance antifasciste. C'est là qu'il commence son drame "Les aventures du brave soldat Schweyk dans la Seconde Guerre mondiale". Avec le réalisateur Fritz Lang, il a créé le film " Les bourreaux meurent aussi" à Hollywood. Il s'agissait d'un film sur l'assassinat de Reinhard Heydrich à Prague et de la résistance antifasciste dans les pays occupés.
En novembre 1947, accusé aux États-Unis d'"activités anti-américaines", il retourne en Europe. Comme il n'est pas autorisé à entrer dans la zone ouest, il décide de se rendre en RDA en 1948, où il crée le Berliner Ensemble, qu'il dirigera jusqu'à sa mort en 1956.
Il a toujours été convaincu que le règne du fascisme ne pouvait pas durer. Déjà en 1941, alors que le fascisme allemand connaissait l'exacerbation de sa politique expansionniste avec l'invasion de l'Union soviétique, Brecht a formulé le message suivant dans l'épilogue de son œuvre "La résistible ascension d'Arturo Ui" :
"Le ventre est encore fécond, d'où est sortie la bête immonde."
Cette citation a été répétée des milliers de fois au cours des 75 années qui ont suivi la défaîte militaire du nazisme, car elle indique clairement que la vigilance et l'action antifascistes sont et restent nécessaires aujourd'hui.
Pour cela, les antifascistes du monde entier sont redevables à Bertolt Brecht.